Monday, September 17, 2007

Le « Bambi Syndrome »

Connaissez-vous le « Bambi syndrome »? Eh bien, nous en sommes tous atteints jusqu’à un certain point. C’est cette tendance que nous avons tous à préférer voir une araignée se faire écraser plutôt qu’un beau papillon multicolore, un pigeon crasseux plutôt qu’un geai bleu, une belle jeune fille plutôt qu’un vieillard édenté et itinérant… Nous savons tous que l’un ne mérite pas plus la mort que l’autre et nous le dirons à haute voix avec conviction, mais au fond, c’est tellement laid une araignée : huit pattes, six yeux, deux crochets et un bon appétit pour les bibittes… On a presque le goût d’entendre le craquement de sa carapace sous notre botte…
Je suis toujours surpris de voir à quel point les journaux utilisent ce principe. Prenons Laura Gainey, par exemple. Bon, ne me lancez pas de roches trop vite, je m’explique… Ça me désole, cette histoire-là. Ça me rappelle à quel point il n’y a pas de justice divine en ce bas monde. Quand on voit Rizzoto, l’un des plus gros parrains de la mafia italienne de Montréal, qui se fait enfin arrêter à 82 ans, le sourire aux lèvres et la santé au corps, alors que de l’autre côté se trouve une jeune femme qui ne l’a pas eu facile, mais qui s’est prise en main malgré les obstacles, remplaçant les substances toxiques par une autre drogue : la voile et la mer! Une passion tellement plus saine qu’elle a fini par la tuer… Alors de deux choses l’une : soit il n’y a pas de destin ou encore le scripteur de l’Histoire humaine n’en a rien à foutre et il est comme un enfant de 5 ans qui a trouvé le fusil de son père. Cela dit, avez-vous remarqué à quel point les journaux l’ont compris, ça? Remarquez ce qu’ils ont rapporté de ce qu’ont dit les amies de Laura :
- Je n’ai pas juste perdu une amie, j’ai perdu une sœur…
- Toute la ville est en émoi.
- C’était une vraie passionnée…
- Elle était toujours positive, toujours souriante…
ZZZzzz… Et que penseriez-vous si, une semaine avant le drame, elle avait montré le doigt d’honneur à une amie? Et si elle avait déjà trompé son chum avec son meilleur ami? Est-ce que sa mort serait alors moins dramatique? Absolument pas! Sinon, la mort de qui que ce soit ne l’est pas non plus, parce que nous avons tous nos propres travers, faisons tous nos propres conneries… Et en même temps, nous sommes également tous comme un frère ou une sœur pour quelqu’un ou pour plusieurs et nous sommes également tous passionnés par quelque chose.
Alors, pourquoi diable ajouter ça dans les journaux? Pour nous émouvoir. Pour augmenter l’effet émotionnel de sa mort. C’est comme une épice à journal. Ça fait le même travail qu’une musique stressante dans une scène de poursuite ou touchante dans une scène d’amour. Comme ça, si ce que nous lisons nous émeut, nous risquons fort de racheter le même journal le lendemain! C’est tellement touchant ce qui se passe dans le monde.
La question que je me pose donc est la suivante. Est-ce que vraiment on veut savoir ce qui s’est passé dans le monde par conscience sociale ou alors ne voulons-nous qu’être divertis?
Personnellement, après réflexion… Je crois vouloir être diverti, inconsciemment en tout cas!

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